Une convoyeuse de l'air en Indochine

C'est pendant la bataille de Diên-Biên-Phù, tout au début.

Nous avions reçu l'ordre d'effectuer coûte que coûte un posé pour évacuer les blessés. À peine étions-nous au sol que les tirs d'artillerie viets s'intensifient. On me fait savoir qu'il faudrait attendre au moins 2 h, car les blessés étaient encore sur un point d'appui et les ambulances ne pouvaient aller les chercher en raison de la violence des tirs.

Convoyeuse en action
Une convoyeuse de l'air en action

Deux heures au sol, cela signifiait la destruction à peu près certaine de mon avion. Je proposais donc de décoller avec un chargement de bombes lucioles, d'effectuer une mission d'éclairage et, dès que les blessés seraient arrivés, de les embarquer rapidement et de filer sur Hanoï.

Cette suggestion fut acceptée et je donnais l'ordre à la convoyeuse d'aller nous attendre au fond d'un abri. Elle ne voulut rien entendre : puisque nous étions dans la merde, nous y serions tous ensemble.

Ayant été appelé au PC du Colonel Piroth, grand maître de l'artillerie, que je trouvais désespéré parce qu'il n'arrivait pas à voir d'où venaient les tirs d'artillerie - d'ailleurs le pauvre homme, je crois, s'est donné la mort deux ou trois jours plus tard - je retrouvais à mon retour à l'avion la convoyeuse assise sur une caisse d'obus, ayant retroussé ses jupes jusqu'à mi-cuisses, en train de fixer les fusées des bombes lucioles. Et pourtant, croyez-moi, ce soir-là, la ferraille volait bas.

C'était ça les convoyeuses d'Indochine, de sacrés bons soldats.


Jean ADIAS

Date de dernière mise à jour : 10/04/2020

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