OPEX 3
Comme à la Redoute, 48 h chrono
Un lundi matin, je décolle avec un LCL "pilote de stylo" (un LCL abonné) d’un bureau du PC du Grand 3, direction l’Allemagne pour une prise d’armes.
La météo, là-bas, est pourrie toute la semaine. Impossible d’aller je ne sais plus où, tous les jours, ½ tour météo et retour à Baden-Baden, dont une fois avec un sacré paquet de neige agglutiné sur le devant de la Gazelle SA-342.
Bref, comme prévu, retour au régiment vendredi après-midi vers 16 h.
Je change de slip (selon l'expression de mon Cne) car nous passons le week-end à Mourmelon, faire des exercices avec des blindés.
Dans la nuit de vendredi à samedi, la porte de la chambrée où nous dormons tous (escadrille au 2/3), la porte s’ouvre en grinçant … On chuchote :
- « Mon Capitaine, mon Capitaine… Vous devez tout de suite appeler votre régiment… ».
- « Gasp ! »
Au briefing du samedi matin très tôt, 4 des membres de l’escadrille (pilotes et CdB) doivent retourner au 3ème RHC. Ils doivent partir… en Afrique.
Pourquoi ? Où ? On ne sait pas.
- « Les autres, on continue la mission prévue ici ».
Je vous passe les :
- « Pourquoi c’est toujours les mêmes qui partent ? »,
- « Pourquoi c’est pas moi ? »
Et toutes ces réflexions de non partants.
Les différents exercices matinaux se déroulent et puis, lors d’un plein de 4 Gazelle autour d'un bac souple et d’une pause où les pilotes et mécanos de l’escadrille refont l’ALAT, nous voyons arriver une Gazelle de la 1ère EHA, qui pose à proximité de nous. Le pilote descendu vise notre groupe pour dire bonjour et le traverse pour aller parler au Cne. À proximité de moi, il me glisse, pas très fort :
- « Prépare ton sac…! ».
- « ??? »…
- « Mon Capitaine, je suis venu pour vous dire que X, Y et Rochard doivent rentrer au régiment. Il y a un problème de vaccinations non à jour de 3 des 4 personnes revenues ce matin au régiment ».
- « Re Gasp ! ».
Je quitte l’exercice sur le champ. En arrivant au régiment, direction l’infirmerie pour une injection de gammaglobuline… Ouille !... J'ai le temps de téléphoner à mon épouse pour lui annoncer mon départ. Impossible de lui dire où, ni pour combien de temps...
Plus tard a lieu un briefing avec le Col B de Pau … qui va nous parler de la mission. Nous allons partir pour faire la guerre… au Tchad.
Non, c’est pas une mission pépère ! On part pour être engagés dans le cadre des accords de défense avec le gouvernement tchadien. Un certain Idriss Deby, après un coup d’état manqué, est parti au Soudan, lever une armée pour revenir et prendre le pouvoir.
S’en suit des détails sur le détachement, la présentation des CdB de Pau et autres mécanos qui nous accompagnent, le climat là-bas, certains us et coutumes du Tchad, le départ. Nous attendons demain dimanche un C-135 et deux Transall sur la base, ici à Étain. Les mécanos sont en train de préparer les machines pour y être embarquées…
Deux Gazelle dans un Transall
Effectivement le dimanche matin les gros avions sont là. Les deux Gazelles Hot sont pales repliées-démontées et embarquées dans un Transall.
Les deux équipages trouvent une place tant bien que mal, genoux repliés, les rangers sur les caisses de munitions "bonnes de guerre", nos armes individuelles en place, un carton de bouteilles d’eau, nos sac ops, pas de fringues civiles… Et c’est tout.
Décollage direction Istres. Là, un des CdB arrivé de Pau la veille, part à la recherche de victuailles et revient avec 3 cageots pour assurer le repas de midi. Merci l’Armée de l’Air…
Redécollage direction N'Djamena atteint après un survol apprécié de zones désertiques qui nous changent de la plaine de Woëvre. Le vol est long tellement nous sommes mal installés. C’est pas la première classe d’Air France, loin de là… C’est que 2 Gazelles Hot dans un Transall, ça prend de la place.
On pose. Découverte de l’aéroport, de nos quartiers, et briefing sur l’actualité… On décollera demain vers l’Est.
Lundi matin très tôt, nous décollons pour un vol technique des Gazelle remontées durant la nuit par "la royale cambouis" autour de N'Djamena avec, pour consignes, de ne pas survoler la résidence où se trouve Hissène Habré… Le palais présidentiel.
Bon on est prêt. On décollera derrière un Transall avec le reste du matériel, nos mécanos et tout et tout.
Deux pleins seront effectués en plein désert "au cul du Transall". Je n’avais jamais fait ça ! Je connaissais la citerne ou le bac souple avec la motopompe, mais pas ça…
Et à midi pile, on pose à destination : Abéché, 750 km Est de la capitale. On résume : prévenu samedi midi à Mourmelon, posé Lundi midi à Abéché !
C’est comme à la Redoute : 48 h chrono !
La suite, c’est une autre histoire…
Denis ROCHARD
Date de dernière mise à jour : 15/04/2020
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