Mission reco sur Louqsor
Le commandant LAPICHE fait mouvement sur CHYPRE par voie aérienne le 27 septembre 1956. Il dirige l'escadron de reconnaissance 1/33, surnommé pour l'occasion 4/33 LIMASSOL dont la mission est d'assurer une couverture photographique de l'Égypte pour préparer ou suivre les opérations de bombardement. Plus de 100 missions en 10 jours, avec une quinzaine d'appareils RF-84F.
Récit d'une mission lointaine sur Louqsor le 4 novembre 1956.
CDT LAPICHE avec le RF-84F N° 285, de 10H30 à 13H10
Points centrés verticaux du terrain de Louqsor pour contrôler le résultat d'un bombardement.
Cette dernière mission restera dans les annales de l'ER 4/33, car l'objectif est situé à la limite du rayon d'action du RF-84F. Depuis plusieurs jours, le terrain de Louqsor a été régulièrement survolé par les Camberra PR Mk7 du 13ème Squadron de la Royal Air Force.
L'examen des clichés confirme la présence d'une vingtaine d'Iliouchine 28 mis à l'abri à Louqsor, dès le début de la phase aéro-psychologique. La présence de ces appareils à Louqsor constitue une menace directe pour une flotte de débarquement. La destruction des pistes de Louqsor ainsi que celle des appareils qui s'y trouvent stationnés devient une priorité. Par deux fois, les Camberra B2 s'en prennent aux installations aéroportuaires de Louqsor en y occasionnant des dommages mineurs. Les appareils, dispersés et protégés par des élévations de sable, sont visiblement toujours intacts. Le 4 novembre 1956, en début de matinée, un raid audacieusement mené par douze F-84F de la 1ère Escadre partis d'Israël est en mesure de détruire plus de 80 % des appareils stationnés à Louqsor.
La mission exécutée par le commandant LAPICHE, quelques minutes après le passage des chasseurs-bombardiers français, a pour but de contrôler le résultat de l'attaque. Il va de soi que le manuel de vol du RF-84F a fait l'objet d'une étude attentive de la part du pilote, de même que les autres paramètres (vents, températures…) ont été intégrés avec une grande précision dans le calcul de la navigation. Une unique caméra K-38, montée en vertical et dotée d'un objectif de 36 pouces de focale, est utilisée afin d'alléger au maximum l'appareil. La consommation est calculée au plus juste. À cette époque, est-il besoin de le rappeler, le ravitaillement en vol ne se pratique pas encore. Avec les pleins normalement faits, la quantité de carburant emporté se monte à 8.800 livres. Pour gagner un peu d'autonomie, les pleins sont complétés à la main, juste avant le décollage afin de porter la quantité de kérosène à 9.200 livres. L'altitude habituelle de croisière de 30.000 pieds est atteinte après 26 minutes de vol. Au moment de se mettre en palier et de réduire à 96 % la puissance du réacteur, les réservoirs contiennent environ 5.000 livres de carburant. Il reste alors encore 710 km à parcourir pour atteindre l'objectif, ce qui prend une heure et treize minutes de vol. Le passage sur le terrain de Louqsor se fait par un large virage axé au sud-ouest (pour bénéficier d'un soleil arrière). Selon le plan de vol, le commandant LAPICHE doit se trouver à la verticale de Louqsor une heure et trente-neuf minutes après le décollage, soit une arrivée prévue pour 12H09. La précision des calculs et de la navigation est confirmée par le fait que les clichés de Louqsor sont pris à 12H05 ! Le programme est particulièrement serré, pas plus de cinq minutes sont réservées à la prise de vues photographiques et à l'observation visuelle de la base de Louqsor, car il faut songer de suite au retour. A cet instant, le RF-84F se trouve à 980 kilomètres à vol d'oiseau de sa base, qu'il atteindra après une heure et trois minutes de vol. A 13H10, de retour au parking, les réservoirs contiennent encore près de 2.000 livres de pétrole, alors que pour une mission normale il en reste généralement un peu moins de 4.000 livres.
Dans le quart d'heure qui suit l'atterrissage, une interprétation de 1ère phase est réalisée à chaud sur les quinze négatifs à peine sortis des bacs de traitement. L'objectif a été entièrement couvert, ce qui permet d'évaluer avec précision les dommages occasionnés par les chasseurs. 17 appareils, dont 10 Iliouchine 28 sont détruits, un autre Il-28 n'étant qu'endommagé. Les pistes sont inutilisables, avec notamment un cratère à l'intersection des deux pistes principales. En milieu de journée, afin de parachever le travail du matin, une demi-douzaine de F-84F de la 1ère EC reviennent pour mitrailler les avions encore intacts.
Date de dernière mise à jour : 02/07/2025
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