Déroutements sur Telergma
Chef de patrouille sur Mistral au « NEU-NEU » à Oran, je suis désigné le 17 mai 1954 pour accompagner le colonel commandant la base. Mission : aller/retour dans la journée sur Bizerte.
Au briefing, le colonel me précise (et il a eu raison) :
- « Je ne suis actuellement pas entrainé au vol aux instruments donc, pas de nuage »
En outre, tout juste lâché sur Mistral il attend de moi que, durant tout le vol, je lui rappelle les procédures, les régimes… etc.
Les choses étant clairement définies nous décollons, moi derrière mon "équipier", et le trajet Oran/Bizerte s’effectue sans problème.
Pour le retour, la météo nous signale la possibilité de quelques nuages (sic) sur la Kabylie.
Au fur et à mesure que nous gagnons vers l’ouest, nous devons descendre à basse altitude pour rester sous la couche (pas de nuage !). Dès lors, je prévois si nécessaire de nous poser à Blida pour compléter les pleins. Dans la vallée de la Souman, tout est bouché. J’ordonne un 180 et décide de nous dérouter sur Telergma où nous nous posons sans encombre.
À cette époque, Telergma c’était une piste et un parking, rien de plus.
Nous sommes accueillis par un cultivateur des environs qui nous invite chez lui. L’allée menant à sa ferme est décorée de chapiteaux et d’éléments de colonnes qui témoignent de la richesse archéologique du sous-sol de la région.
Le lendemain matin, arrivée d’une citerne et d’une équipe de mécaniciens qui remettent en œuvre rapidement nos deux avions. Un Siebel se pose : le commandant Avon, commandant la 7ème Escadre est venu de Bizerte s’assurer que tout est en ordre.
Décollage et montée en altitude, le temps étant splendide. Nous sommes en palier depuis environ cinq minutes quand survient une forte détonation, mon avion est secoué brutalement et je suis privé de radio. Néanmoins, je constate que les commandes répondent parfaitement et que les paramètres réacteur sont normaux.
L’autre avion rassemble et le colonel me fait des grands signes que j’ai du mal à interpréter, me montrant en particulier le bas du fuselage.
Sans radio, je lui fais signe de continuer seul et lui indique que je retourne à Telergma. Il a parfaitement compris et s’éloigne vers l’ouest. Je retourne vers mon terrain de départ où je me pose après une approche de précaution (sur la pointe des pieds, dirait-on).
Au sol, je constate les dégâts : les deux panneaux fermant le compartiment canons ont disparu. Se rabattant sur le coté gauche, il on crevé le revêtement d’intrados.
Le lendemain, un nouveau convoi arrive de Bizerte pour me dépanner. Revenu sur place, le commandant Avon :
- « Alors, Houben, encore vous ? »
Retour à Oran sans histoire, par grand beau temps.
Et j’ai eu droit aux félicitations du colonel …
Si, si, c’est vrai !
Jean HOUBEN
Date de dernière mise à jour : 24/04/2020
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