Visite au Sahara

Il me revient souvent maintenant de revoir des moments qui ont compté dans ma vie mouvementée, des bons et des mauvais.

J'ai envie de vous faire part de quelques-uns afin de me soulager mais surtout pas par orgueil. Alors si cela vous plait j'en serais très heureux, sinon : corbeille, indésirables, etc... Nous resterons amis.

Nous sommes en 1966. Il y a six ans que je suis en Espagne. Tous les ans, depuis que mes amis del Ejercito del Aire Espanol m'ont donné le titre d'Attaché de l'air adjoint (bien pompeux) je suis invité au voyage organisé par le 2° Bureau espagnol. Cette année c'est quatre jours aux Canaries et une journée dans le Sahara Espagnol, à El Aiün.

Réception en grandes pompes de tous les Attachés de l'air de Madrid. Il ne manque que les Russes, mais c'est encore Franco le patron.

Enchantement à Las Palmas, tour de l'île, achats dans un pays hors taxes. J'achète une caméra super-huit le quart du prix de chez nous...

Puis le Sahara. Le DC-4 nous emmène sur ce terrain espagnol, piste de 2.400 mètres. C'est le printemps, météo idéale.

En fin de journée réception sous la tente pour l'apéro, tapas and Co.

Méharistes

Nous sommes face au désert. Quelques temps après notre arrivée nous voyons apparaitre à l'horizon une caravane de chameaux très, très loin. Il y en a une cinquantaine environ. Pendant nos discussion la caravane arrive à proximité et nous pouvons voir des méharis armés. Dixit le patron du 2° Bureau :

- « Ce sont nos partisans ».

Invités à se joindre à nous, le commandant s'assoit en face de l'Attaché de l'air américain dont la femme (oui, j'avais oublié, les femmes sont avec nous) est du genre top model, blonde, yeux bleus, enfin tout… Subjugué, le méhari en devient gênant pour nous tous car il ne la quitte pas des yeux.

Et peu à peu commence à discuter avec l'Américain. Avec un fort accent arabe il lui propose d'acheter sa femme, combien elle coûte ?

Le méhari commence à 10 chameaux. Un véritable froid dans l'assistance... et bizarrement les Espagnols n'interviennent pas ! les discussions reprennent puis on entend : 80 chameaux... re-silence.

Le malaise est de plus en plus marqué. Le marché dure environ une heure, très, très longue, étant donné les circonstances.

Nous arrivons à 100 bêtes et l'Américain est sur le point d'exploser, sa femme ne sait plus comment se comporter et nous aussi. Mon colonel, Charles Delvoye, le doyen des Attachés est sur le point d'intervenir...

Le méhari retire alors son turban, sa djellaba. Apparait alors un très jeune capitaine de l'Armée espagnole. Et le patron expliquant que la scène était une de leur plaisanterie rituelle.

Ouf ! On a bien rit ... après coup !


Maurice DEMESSANCE

Texte d’origine inconnue paru sous le titre « Souvenir… »

Date de dernière mise à jour : 05/04/2020

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