Que faisait le 612 train sorti ?

13 septembre 1962 : l'EB 1/92 est déployé à Saint-Dizier dans le cadre de l'exercice "Check Mate".

Nous décollons sur le Vautour IIB n° 612, en pleins complets, pour une mission "Haut-Bas-Haut", avec un objectif dans le sud du pays. Au retour, un point pétrole nous confirme une bonne marge de manœuvre, et nous décidons, enfreignant les ordres de vol, d'aller rendre visite à nos familles respectives, à M…, dans le Jura, et à Mirecourt, dans les Vosges.

Résumé du dialogue entre pilote et navigateur, chemin faisant :

- « Qu’est ce qu’on fait ? »

- « Je connais tout le monde, les gendarmes sont des amis, on peut y aller… ».

Nous descendons à basse altitude et, après un premier passage à grande vitesse pour signaler notre arrivée, nous effectuons un passage lent, train sorti, sur la maison familiale du navigateur (maman est au balcon), suivi d'une montée à pente (et bruit) maximum, et de quelques figures de voltige (le pilote est entraîné aux présentations en vol).

Satisfaits, nous mettons ensuite le cap vers les Vosges, pour quelques évolutions sur Mirecourt (moins bas, car il s'agit d'une ville de 6.000 habitants), puis rentrons à Saint-Dizier.

À l'arrivée au parking, le capitaine R.S. (nom corse bien connu), nous attend au pied de l'avion, l'air sombre, et nous dit :

- « Le commandant vous attend dans son bureau ».

Un pressentiment nous vient alors que nous cheminons vers le PC, nous sous-estimons encore la gravité de la situation.

Le chef nous pose une question simple et sans appel :

- « Que faisait le 612 à 11h27 verticale M… train sorti ? »

Nous n'entrerons pas dans le détail de l'avoinée qui suivit. Notre affaire tombait mal, car suite à plusieurs incidents, le CEMAA avait menacé de radiation du PN tout coupable d’indiscipline en vol. Néanmoins, nos chefs nous protégeront, et notre cas sera éclipsé quelques semaines plus tard par un incident beaucoup plus grave : la coupure du câble d'un téléphérique par un F-84F.

V2B 612
Vautour IIB

La dénonciation, faite directement auprès de la Région aérienne, émanait d'un ancien camarade du navigateur, ex-rival auprès des belles de M…, employé à la SNCF, et qui attendait de pouvoir relever le numéro de l'avion, jumelles posées sur son bureau, (nous étions déjà passés plusieurs fois…, et les numéros du Vautour étaient d'une taille sans commune mesure avec ceux des avions actuels).

Nous aurions dû nous méfier : la localité survolée se nomme… MOUCHARD !


Claude MICHEL et Guy CAUBERT

Date de dernière mise à jour : 05/04/2020

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