Crash en Alphajet

Alpha jet
Alphajet (P. Schwartz)

C'est un projet qui avait muri dans l'esprit de 3 élèves-pilotes Saint-Cyriens qui s'étaient joint à notre promotion, mais avec une différence : ils étaient Lt. Ils habitaient ensemble dans un très joli château, préféré à une chambrée sur la base.

Ce vendredi soir, ils organisent un apéritif suivi d'un diner traiteur en ces lieux. Toute la promo est réunie. Il ne manque plus que le chef des Véras (mon escadrille).

Un coup de fil nous apprend que, ce soir d'été, un crash a eu lieu sur la base. On en sait pas plus. Et notre Chef se rendait sur place de l'escadrille pour avoir un premier débriefing.

L'accident s'est produit avec un Alphajet d'un autre escadron, en dernier virage, avec 2 pilotes à bord. L'élève-pilote place arrière était sous capote, et donc n'a rien vu du tout. Il a subi de manière extrêmement brutale ce crash. Devant, se trouvait un moniteur. C'était donc en entrainement au vol sans visibilité (VSV). Du moins pour le retour. En effet cet avion revenait aussi d'une mission navigation sur je ne sais plus quel terrain.

Les conditions météo sur le site étaient idéales : peu de vent, une visibilité excellente, un parfait CAVOK (Ceilling And Visibility OK).

L'heure d'arrivé de ce vol étant après l'heure théorique de fin des vols "école", le CdB décidait de faire un atterrissage à vue classique et non pas en se mettant sur le faisceau ILS (Instrument Landing System) comme cela se fait en VSV. Arrivé par le point Novembre où lui fut donné les conditions météo, il passait verticale du terrain, fit un virage pour se retrouver vent arrière, diminua sa vitesse, sorti le train d'atterrissage, et se retrouva en étape de base. Une arrivée classique sur un terrain.

Verticale, il fut annoncé n° 2 pour l'atterrissage, derrière une patrouille de tel escadrille, en longue distance.

Mais voilà : le vent était faible. Au point que la tour prévoyait de changer de QFU (sens d'atterrissage des avions) au plus tôt, après le poser de ces 3 appareils. L'Alphajet se présenta en étape de base (perpendiculaire à la piste, toujours n° 2, derrière une patrouille en courte finale !).

Nous l'apprîmes le lendemain, l'appareil numéro 2 fut pris dans les turbulences de sillage de la patrouille numéro 1, en dernier virage et s'écrasa au sol.

Le moniteur d'expérience mis l'appareil en virage à gauche pour se poser, et décrochât dans ces turbulences, perdant donc de la hauteur ! Et comme il était très bas, il se crashât. L'appareil touchait le sol avec son aile droite, bien qu'il était en virage à gauche. L'aile fut cassée immédiatement et la carlingue s'écrasa au sol et fit plusieurs tonneaux dans le champs de maïs qui se trouvait à l'entrée de la piste.

Dès le premier choc au sol, le moniteur fut éjecté à l'horizontale sur son siège éjectable, sans qu'il ait agit sur l'une des 2 poignées de déclenchement de celui-ci.

En place arrière, l'élève-pilote qui avait juste senti le décrochage sans voir ce qui se passait, a percuté de sa tête, le tableau de bord de la place arrière, avec une rare violence.

Après ces tonneaux, l'appareil n'a pas été incendié et les secours sont arrivés très vite. Ils ont retrouvé le CdB sur son siège éjectable et l'élève dans l'appareil. Ils étaient tous les deux bien sonnés mais conscients et furent conduit en sécurité à l'hôpital.

Nous avions revu ces 2 membres d'équipage plus tard. L'élève, ayant percuté le tableau de bord tellement fort avec sa tête casquée et son masque à oxygène, avait son œil gauche couleur sang. On ne voyait que ça, sans voir la couleur de celui-ci, ni l'iris et encore moins le blanc de l'œil ! C'est tout juste si on ne voyait pas les aiguilles des instruments de bord marquées sur son visage, et utiles aux enquêteurs de la sécurité des vols, disions-nous pour plaisanter quand il fut mieux.

Le moniteur avait eu quant à lui, un tassement de colonne sans gravité. En effet, le siège éjectable quitte l'appareil avec une accélération de 25 fois le poids du corps de son occupant (25 G) pendant très peu de temps, sans percuter la verrière dont une partie explose dès que le siège commence à s'extraire de l'appareil.

Pas très longtemps après, ils avaient repris leur place et continuèrent de voler sans séquelles, et l'élève fut breveté Pilote de Chasse.

Il ne restait plus que 2 éjections au CdB avant de demander un reclassement Transport ou Hélico. En effet, les pilotes ont "droit" à 3 éjections et c'est tout. Ils reçoivent quand même une belle cravate de la part du fabriquant du siège...

Mais bon, on m'a appris à Tours, lors du cours extrêmement intéressant sur le siège éjectable, que celui-ci était la dernière assurance-vie d'un pilote de chasse quand il était utilisé dans son domaine de vol...

Denis ROCHARD

Date de dernière mise à jour : 10/04/2020

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