Atterrissage forcé en zone rebelle

Pendant la guerre d'Algérie, j'étais à Colomb-Béchar, au Groupe Saharien de Reconnaissance et d'Appui, sur Junkers 52. C'était en plein été, en pleine chaleur. On avait décollé avec notre antique guimbarde pour aller ravitailler un poste dont je ne me rappelle plus le nom, mais qui était situé à l'est de Colomb-Béchar, dans le bled, au pied du djebel .....

On amenait du ravitaillement. C'était un poste tenu, chose assez rare, par une unité de sahariens. D'habitude, dans ces coins-là, c'était plutôt la Légion.

On amène le ravitaillement. C'était un coin perdu, perdu. Les gars nous avaient montré deux mortiers en batterie, prêts à tirer parce que, la nuit précédente, ils avaient été harcelés par des fellaghas. Le coin n'était donc pas sain.

On remet en route et on avait le moteur droit qui s'arrêtait sans arrêt. Il démarrait bien, puis, au bout de quelques 30 secondes, il s'arrêtait. On réussit à le remettre en route, on fait un point fixe satisfaisant. On décolle, on fait peut-être 10 minutes de vol et le moteur droit nous lâche complètement. Avec la chaleur qu'il faisait et la vétusté du matériel, on ne pouvait pas tenir sur deux moteurs. J'étais très bas et j'ai dû faire un atterrissage forcé d'extrême urgence, en évitant par miracle un djebel qui était devant nous.

On se pose dans la nature et le radio, un bon radio qui avait gardé l'écoute et eut le temps de passer un message de détresse. Ça, je dois reconnaître : chapeau pour les réactions qu'il a eues !

Dans les 10 minutes qui suivirent, j'avais une patrouille de T-6 de Colomb-Béchar au-dessus de nous en cercle défensif pour nous protéger.

Trois heures après sont arrivés des éléments motorisés d'une Compagnie saharienne portés de la Légion qui ont fait un périmètre de sécurité autour de l'avion et qui nous ont gardés pendant toute la nuit. Avec ces gens-là on était tranquille.

Je peux dire qu'on a dormi relativement confortablement sous les ailes de l'avion. Le jour s'est levé. Le camion de dépannage est arrivé avec l'officier mécanicien. On lui a expliqué cette panne en lui disant :

- « On ne comprend pas ! Le moteur tourne et puis, de temps en temps il s'arrête sans préavis »

C'était un vieux soldat, l'officier mécanicien, un gars qui connaissait bien le boulot. Il me dit :

- « Il y a eu un vent de sable violent avant hier. À tous les coups le carburateur a boufée du sable et c'est ce sable qui t'obstrue l'alimentation d'essence ».

C'était effectivement ça. Autrement dit, en exagérant un peu, on peut dire que quelques grains de sable avaient failli nous faire casser la figure.

Je garde le souvenir de cette petite aventure : la rapide réaction des moyens qu'on a mis à notre disposition pour nous rendre service, la patrouille de chasse très rapidement autour de nous, très rapidement aussi l'arrivée de la Compagnie saharienne portée de la Légion.


Jean ADIAS

Date de dernière mise à jour : 07/04/2020

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